À l'initiative d'HPF, le pot horticole devient vecteur de valeur !
Faire payer le pot de la plante au client, une hérésie ? Pas si sûr. Une expérience menée par le réseau HPF (Horticulteurs et pépiniéristes de France) tendrait même à prouver que c'est possible, voire intéressant d'un point de vue financier... Explications et analyses des deux entreprises qui ont testé ce concept : Proflora, à Bergerac, en Dordogne, et Meury-Fleurs, à Réville, dans la Manche.
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Depuis l'invention du conteneur, le pot horticole est essentiellement un déchet : emmené par le consommateur lors de son achat sur le point de vente, il finit le plus souvent à la poubelle. Comme tout déchet, il peut aujourd'hui devenir un vecteur de création de richesse. C'est du moins l'objectif d'HPF, qui teste depuis plusieurs mois dans son réseau le paiement d'un surcoût pour le pot au moment de l'achat, contre une remise à valoir sur de prochaines emplettes.
Attention : il ne s'agit pas d'une consigne, qui est un service dont le coût doit être facturé avec une TVA différente de celle de la plante et doit faire l'objet d'un remboursement en espèces lors du retour en magasin, mais bien d'une augmentation du prix des végétaux au moment de l'achat, qui sera suivie d'une remise lorsque le client rapportera ses pots. L'idée qui sous-tend cette action mise en place par HPF est multiple : revaloriser les prix des produits, créer de la notoriété, impliquer le client dans une démarche citoyenne de recyclage, mais aussi et surtout, fidéliser le consommateur en l'obligeant à revenir et à racheter d'autres plantes...
Différer les retours pour éviter la cohue
L'opération repose sur la mise au point par HPF de deux contenants spécifiques siglés au nom du réseau : des pots horticoles blancs de 9, 10,5, 12, 13 et 14 cm et des conteneurs de couleur taupe pour les plantes de pépinière vendues en 3, 4, 5, 7,5 ou 10 l. Ces pots sont vendus 5 centimes pour le pot de 9, 10 pour les autres pots blancs, 50 pour les conteneurs de 3 l, et 1 euro pour les autres conteneurs taupe, plus chers que les pots non siglés. Ils sont plus chers pour le producteur que les pots classiques, mais avec un surcoût raisonnable car HPF a traité directement avec des fournisseurs pour commander de grosses quantités. Quoi qu'il en soit, ils s'avèrent intéressants tant du point de vue de l'image que de celle de la marge...
Pour éviter d'engorger encore plus les magasins en pleine saison, les initiateurs de la démarche suggèrent de décaler les retours des pots dans le temps : la reprise peut, par exemple, être effectuée à partir du 1er juin de l'année de la vente jusqu'au 1er avril de l'année n + 1. Cela permet en outre de reporter du chiffre d'affaires sur des périodes où il est moins important...
Deux entreprises du réseau ont testé en 2013 la gestion des retours de pots. Il s'agit de Proflora, à Bergerac (24) et de Meury-Fleurs, à Réville (50). Elles ont présenté leur retour d'expérience lors de l'assemblée générale d'HPF, à Troyes (10), en septembre dernier (le Lien horticole n° 857 du 2 octobre 2014).
La première entreprise, Proflora, a testé l'opération sur des pots de 10 et de 13 cm, vendus 10 centimes plus cher, pour un total de 30 000 pots. « L'opération a été très bien comprise », estime François Ritlewski, directeur de cette société. « Aucun client ne nous a fait de remarques sur le prix des végétaux. Quelques-uns ont souhaité nous laisser les pots directement à la caisse, d'autres ont voulu ramener des pots autres que ceux qui sont siglés HPF, mais après quelques explications, tout est rentré dans l'ordre. » L'entreprise a choisi de décaler les retours, à partir du 1er juin. Pour l'encaissement, une touche spéciale a été créée pour gérer les ventes et tout s'est très bien passé. Les retours n'ont posé, pour le chef d'entreprise, aucun problème. Environ 1 400 contenants ont été rendus au magasin par les clients. Ils n'ont toutefois pas été remis en culture, car trop compliqués à gérer en production : les pots récupérés ne passent plus dans la dépileuse. L'établissement a donc organisé leur recyclage via un organisme. Proflora a réalisé une bonne opération financière : le surcoût des pots a représenté un investissement de moins de 300 euros. La gestion des retours, 7 pots en moyenne par client pour 200 personnes qui sont revenues avec des contenants, a été estimée à 15 secondes par client, soit environ 1 heure de travail et 45 euros de charges. Les retours ont coûté à l'entreprise 140 euros supplémentaires. Le tout à mettre en face d'une collecte de 3 000 euros (30 000 fois 10 centimes) !
Le client perçoit une part de citoyenneté
L'entreprise Meury-Fleurs a, quant à elle, testé le dispositif sur une gamme plus étendue : elle a pratiqué une hausse de 10 centimes sur les pots de 10,5 et 12 cm, de 50 centimes sur les conteneurs de 3 l, et de 1 euro sur les conteneurs de 5 l. La gestion des retours s'est faite dès le début.
Comme son collègue de Proflora, Frédéric Meury a constaté que l'opération s'est parfaitement bien passée : « Nous n'avons eu aucune difficulté à gérer les retours. La démarche a été très bien perçue par le consommateur et pour nous, ça a été une façon d'augmenter nos prix. » À l'entrée du magasin, un panneau explique la démarche aux clients : « Nos pots horticoles, contrairement à la plupart des plastiques alimentaires, sont en polypropylène (PP) et non en polyéthylène. La filière de recyclage du PP n'existe pas toujours dans nos collectivités. Ces matières finissent donc brûlées ou incorporées dans le goudron. Il nous est apparu logique de contribuer à notre manière au recyclage de vos pots en les collectant pour les réutiliser ou les recycler. » Cet outil indique également que seuls les pots blancs HPF désinfectés peuvent être réutilisés en culture, mais qu'une collecte homogène de produits permet de trouver des industriels capables de les recycler... Le client perçoit ainsi une part de citoyenneté dans le fait de payer pour les pots qu'il achète. L'entreprise s'est attachée à ne récupérer que les pots HPF et a refusé de payer les pots classiques, ces derniers ont été collectés dans un pallox installé à l'entrée du parking.
Elle a réalisé son test sur 7 000 pots de 10,5 cm, 3 000 de 12 cm, 2 000 conteneurs de 3 l, et 400 de 5 l pour un surcoût d'environ 45 euros. Là aussi, les retours se sont élevés à 7 pots par personne, et 161 consommateurs les ont ramenés. Soit moins d'une heure de travail pour gérer ces opérations. Si les montants consignés sont progressifs, on peut constater que les retours ne le sont pas : 630 pots de 10,5 cm ont été ramenés (9 % de ce qui a été vendu), 240 pots de 12 cm (8 %), 220 conteneurs de 3 l (11 %), et 40 conteneurs de 5 l (10 %). Le surcoût important sur les gros contenants n'a pas motivé les clients à demander leur dû. L'entreprise a pour sa part collecté un chiffre d'affaires supplémentaire de plus de 2 000 euros.
Le consommateur est prêt à payer plus cher
Reste que la démarche se poursuit, et que, depuis la présentation qui a été faite au mois de septembre et jusqu'à la prochaine saison, des retours ont dû être gérés ou devront l'être. Des reprises de pots de plus de 70 % pour Proflora et de plus de 85 % pour Meury-Fleurs (qui en a vendu moins, mais de plus grosse taille) représenteraient une perte de trésorerie. Mais si ces chiffres venaient à être dépassés, ces traitements généreraient du trafic en magasin, donc des actes d'achat et du chiffre d'affaires supplémentaire, estime HPF, qui vise à étendre l'opération à l'ensemble du réseau pour pouvoir communiquer à l'échelle nationale.
Pour l'instant, le concept montre que le consommateur est prêt à payer ses achats plus cher si on lui explique le but de la démarche. Il permet d'anticiper une éventuelle taxe à venir sur les emballages et surtout de revaloriser le produit horticole, qui en a particulièrement besoin dans le contexte actuel...
Pascal Fayolle
MajorationSelon leur taille, les pots sont blancs ou taupe, et le coût qui leur est appliqué est progressif, de 10 centimes à 1 euro.
MessageLe contenant devient un facteur de notoriété pour le producteur, et de fidélisation : il oblige le client à revenir.
GammeLa réalisation des pots a été négociée par HPF pour l'ensemble des adhérents afin d'en rendre le surcoût supportable.
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